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« Du coaching sportif à l’intégration dans l’emploi pour l’apprentissage d’un métier efficient et durable »

La POEC « Dispositif d’insertion par le sport » cible les « NEETs » (« neither in education, employment or training »). Autrement dit : des jeunes de 15 à 29 ans non scolarisés, sans emploi ou formation. En France, les études constatent qu’ils seraient 1,8 million (France stratégie), et que le décrochage scolaire ou le taux de chômage dans les quartiers prioritaires est bien plus élevé que la moyenne nationale (dans certains quartiers, le chômage peut atteindre 50 % chez les jeunes). Une solution : l’alternance. En l’associant à une préparation en amont aux valeurs du sport : l’engagement, le collectif, le dépassement de soi et la compétition alors elle devient une voie royale vers la réinsertion de ces publics pour un emploi durable.

C’est tout le défi de ce programme. 

La mise en place du projet, avec Sarah – Responsable du dispositif

26 ans, championne du monde de kick-boxing (2015) et de France de karaté semi-contact (2016), et responsable nationale du projet de POEC « Dispositif d’insertion par le sport » d’AKTO. « Mens sana in corpore sano » : cette citation convient parfaitement à Sarah Soilihi qui mène de front une carrière de sportive de haut niveau et un doctorat de droit à l’Université d’Aix-Marseille. Elle nous livre son expérience.

Avant ce projet, les séances de témoignage se transformaient souvent en coaching bénévoles des jeunes qui voulaient être conseillés dans la création d’une association ou d’une société, la recherche d’un stage ou d’un emploi, qui voulaient connaître les droits et les devoirs des salariés et des employeurs, etc.

Sarah Soilihi, responsable du projet pour AKTO

Terre d'emploi : "Quand on leur tend la main, les jeunes des quartiers la prennent !"

Sarah Soilihi, responsable du projet pour AKTO

Comment s’organise votre mission ?

S.S : Ma tâche consiste à aller vers des jeunes qui souhaitent se former à différents métiers (sécurité, hôtellerie-restauration,…) et de rechercher surtout des entreprises prêtes à les recruter. Le jeune intègre ainsi un « parcours d’excellence » dans le cadre d’une POEC de 400h (formation métier/coaching sportif), puis il signe un contrat en alternance (contrat de professionnalisation ou d’apprentissage). Je m’assure aussi que l’entreprise d’accueil s’engage à insérer durablement les jeunes qu’elle aura formés.

Le contrat de professionnalisation ou d’apprentissage signé par un jeune qui s’engage dans ce « parcours d’excellence » prolonge une immersion en entreprise effectuée dans le cadre d’une POEC (Préparation opérationnelle à l’emploi collective). « Le coaching est essentiel pour que les jeunes déscolarisés reprennent confiance en eux et apprennent à gérer le stress lorsqu’ils se présenteront devant un employeur. L’effet groupe fait que nous avons peu d’abandons ».

C’est pour cette raison que j’ai accepté de participer au projet : nous allons à la rencontre des jeunes et leur tendons la main, ce qui est rarement le cas, et ils la prennent, contrairement à l’image parfois véhiculée sur les jeunes des quartiers ! Ils deviennent les ambassadeurs de leur propre projet pour les autres jeunes du quartier et sont un atout pour la société car demain, c’est eux qui tendront à leur tour la main aux futures générations.

J’ai aussi pour mission de mobiliser des acteurs localement, pour parrainer le projet sur le territoire : sportifs de haut niveau, chefs d’entreprise, élus engagés,… On est dans l’essaimage d’un savoir-faire, d’un accompagnement grâce à l’expertise de l’organisme de formation, mais on doit aussi être dans le « faire-savoir », par la communication, raconter de belles histoires et sortir des poncifs sur les jeunes des cités.

Comment se caractérise ce projet sur le territoire ?

S.S : Je travaille avec le directeur régional et le chef de projet local affecté au dispositif. Ces derniers connaissent bien les entreprises sur leur territoire et leurs besoins en recrutement. L’ambition est de réaliser un maillage branche/territoire pour répondre aux besoins en recrutement des entreprises et aux métiers en tension. L’objectif est aussi de mettre en place des opérations qui vont mobiliser des entreprises qui croient aux vertus du sport, apporteur de valeurs dans la qualité de vie au travail, le challenge et le dynamisme que peuvent apporter les sportifs dans un collectif salarié.

Je suis également en contact avec les centres sociaux qui connaissent bien les jeunes, les missions locales et Pôle emploi. On fait du sur-mesure en optimisant et combinant des ingénieries financières et pédagogiques avec des partenariats locaux auprès de la Région, du département, de la collectivité et les opérateurs du service public de l’emploi.

Comment s’effectue le partenariat local entre les acteurs en charge de l’emploi et de la formation ?

S.S : Il s’agit d’un projet collectif largement partagé par tous les acteurs locaux : la Région, la ville, l’agglomération,… et les opérateurs du service public de l’emploi. On joue avec les dispositifs existants. On les optimise.

Le projet fonctionne car il est partagé par des acteurs qui croient profondément aux vertus du sport et de l’engagement.

La preuve par l'exemple, avec Bilel – Ambassadeur du projet

Depuis plusieurs années, le boxeur Bilel Latreche met son expérience de sportif de haut niveau au service de l’insertion des jeunes des quartiers sensibles. Il est ambassadeur de la promotion de Dijon car, dit-il, c’est « une combinaison gagnante de ‘sur-mesure’, d’apprentissage des codes de l’entreprise, des règles de vie en société et de sécurité financière. »

« No pain, no gain. Pas de victoire sans sacrifice. »

Depuis ses huit ans, le jurassien Bilel Latreche (32 ans) se bat dans la vie comme sur le ring. « Je suis un enfant de ZUP. Très tôt, je me suis mis à la boxe anglaise jusqu’à intégrer l’équipe de France amateur. » Il remporte son premier titre majeur à l’âge de 23 ans à Dijon en devenant champion du monde professionnel chez les espoirs de l’IBF (International Boxing Federation, l’une des 4 fédérations majeures mondiales en boxe) des poids super-moyens en juin 2010.

Bilel Latreche s’empare de la ceinture de champion de France des super-moyens en novembre 2013 et devient ainsi le numéro 1 français de la catégorie super-moyens. À ce titre, il entre dans l’histoire des sportifs jurassiens en devenant le premier boxeur du Jura à être champion de France professionnel en boxe anglaise.

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Bilel Latreche  / Boxeur et ambassadeur du projet

Des études et un engagement social auprès des jeunes

Avec un bac pro comptabilité puis une licence STAPS (Sciences et techniques des activités physiques et sportives), il enrichit son parcours professionnel en décrochant un diplôme de sophrologue puis de thérapeute social qui le conduisent à exercer le métier d’animateur sur différents territoires, et de formateur d’éducateurs spécialisés.

Depuis 2018, il est le coach mental des joueurs de l’équipe de l’USON Nevers Rugby (Pro D2). Ainsi, très tôt, il s’est engagé dans la réinsertion des jeunes et des adultes en échec social, scolaire ou professionnel. Il intervient aussi dans les centres liés au ministère de la justice. C’est donc naturellement que Bilel Latreche accepte la mission d’ambassadeur de la promotion de Dijon sur l’ensemble du territoire métropolitain et ultramarin.

« Ma mission consiste à témoigner sur mon parcours au début de la formation des jeunes. À mon époque, nous n’avions pas cette opportunité de bénéficier d’une seconde chance de se former, et je le leur dis : ’On vous propose un parcours sur-mesure, rémunéré, avec la possibilité d’intégrer une entreprise, foncez !’ ».

« Les jeunes, saisissez votre chance ! »

Bilel Latreche puise dans son expérience de sportif de haut niveau les mots qui motivent : « J’étais entouré, soutenu par mon équipe mais sur le ring, j’étais seul. Seul responsable de mes actes. Ce qui m’autorise à dire aux jeunes d’arrêter de reporter sur les autres la responsabilité de leurs échecs. C’est plus facile de tenir un discours de victimisation que de se prendre en main. Agissez pour ne pas être des assistés. Saisissez votre chance. »

L’illustration de l’apprentissage d’un métier, avec Yanis – Animateur du projet

« Au début, les jeunes nous insultaient, aujourd’hui, ils nous attendent ». Depuis 2018, Yanis Boubekker (23 ans), animateur sportif dans les quartiers Nord de Marseille participe au dispositif d’insertion par le sport (Ex-Terre d’emploi) porté par AKTO. Une expérience riche en enseignements qu’il nous raconte.

Aujourd’hui, Yanis Boubekker (23 ans), animateur sportif dans les quartiers Nord de Marseille est heureux du changement constaté. « Au début, quand nous arrivions pour proposer des activités, aucun jeune ne répondait. Certains nous insultaient. Aujourd’hui, ils nous attendent. »

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C’est par la mairie de Marseille que le jeune animateur a été contacté pour participer au projet.  « Je préparais seul le brevet professionnel de la jeunesse, de l’éducation populaire et du sport (BPJEPS) « Activités physiques pour tous » ». Lors de la réunion d’information sur le projet, j’ai réalisé l’opportunité que ce projet représentait pour moi », raconte YanisPendant quatre mois de pré-formation, il a bénéficié d’une préparation physique et mentale et d’une remise à niveau des savoirs de base dont la maîtrise est indispensable pour présenter le dossier de candidature auprès du futur employeur et réussir le brevet.

Yanis a signé en juillet 2018 son contrat d’apprentissage avec le groupement d’employeurs « Objectif Plus » et suit sa formation au sein de Futurosud, le CFA régional hors les murs des métiers du sport, de l’animation et du tourisme. Son contrat court jusqu’en juillet prochain.

« Je travaille trois jours par semaine au sein de l’association marseillaise « Une autre image » ». Je mets en place des parcours sportifs, je donne des cours de hip hop et de modern jazz pour les jeunes et de gym douce pour les adultes. J’accueille et j’encadre les enfants qui viennent à l’association, mais je me déplace aussi dans les quartiers car les parents préfèrent souvent que les animations se passent près de chez eux. J’essaie d’avoir un rôle de médiateur. »

Le jeune homme fait aussi du soutien scolaire et tente de faire passer un message : « Restez à l’école si vous voulez vous en sortir. »

L’insertion professionnelle avec Willy Loliia Saco – coach physique et mental

Willy Lollia Saco est coach physique et mental de jeunes engagés dans la POEC « Dispositif d’insertion par le sport » (Ex-Terre d’emploi) pilotée par AKTO. Cet ancien boxeur leur transmet les valeurs du sport et leur enseigne les bases d’une bonne hygiène de vie. Il nous raconte…

Titulaire du brevet professionnel de la jeunesse, de l’éducation populaire et du sport (BPJEPS), d’un BEP Nutrition et Alimentation et entraîneur de boxe (prévôt fédéral à la Fédération française de boxe), Willy Lollia Saco a coaché deux promotions de 53 jeunes.

« C’est à Marseille où j’ai développé mon activité de coach sportif et où le projet a vu le jour que j’ai rejoint l’aventure. Tout est affaire de rencontres. D’abord, avec la mairie de Marseille qui m’a permis d’entraîner des jeunes du 15ème arrondissement. Puis avec Sarah Soilihi qui m’a mis en contact avec l’organisme de formation. J’ai participé à ‘Toulon-Terre d’emploi’, puis à ‘Var-Terre d’emploi’ et aussi Nice, après la Guadeloupe. »

« Je m’occupe de leur préparation physique et mentale mais je leur enseigne aussi le sens de la hiérarchie, le respect, ce qui leur sera très utile en entreprise. Je leur propose également une initiation à la citoyenneté. Le fait d’être entraînés comme des sportifs les valorise. Le sport permet de remettre un jeune en selle. Pour preuve, « les promotions que j’ai accompagnées ont réussi leurs examens à 100 % ».

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L’insertion professionnelle avec Angelina – benjamine du projet et Serge Villeneuve, directeur d’un restaurant-école

À 17 ans, Angelina est la benjamine du projet. Elle effectue chez McDonald’s un apprentissage en CDI pour obtenir le titre d’agent polyvalent de restauration. « Une étape » dans son parcours d’insertion. Elle témoigne de son expérience aux côtés de son formateur et d’un restaurateur, employeur d’un autre bénéficiaire du programme.

Angelina, c’est la mascotte ! 17 ans, yeux en amande et chignon de danseuse, c’est elle, la benjamine de l’opération, qui a allumé le flambeau des premières Olympiades des Terres d’Emploi qui ont réuni 700 personnes au Stade de France à Saint-Denis le 20 septembre 2019.

Angelina Belgacem a commencé son apprentissage en CDI chez McDonald’s à Valence dans la Drôme en septembre 2019, après avoir intégré le dispositif.

« C’est un éducateur de quartier qui, via la mairie de Valence, m’a mise en relation avec l’organisme. On m’a dit qu’il existait un parcours d’intégration dans lequel on faisait du sport pour prendre confiance en soi, acquérir l’esprit d’équipe et qui permettait d’obtenir un diplôme et de signer un contrat d’apprentissage à la fin, ou même avant, car des employeurs nous proposent un contrat avant la fin du parcours … », raconte la jeune fille. Tous les lundis, elle suit sa formation en centre et le reste de la semaine, elle travaille au restaurant.

Pour Angelina qui a quitté le collège en 4ème, testé une École de la Deuxième chance et fait plusieurs stages dans le bâtiment, « le but est d’obtenir un diplôme dans la restauration et de pouvoir inscrire dans son CV une vraie expérience professionnelle ».

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Serge Villeneuve, directeur du restaurant-école « Aux Halles de la mer » à Valence, est lui aussi engagé dans le projet en tant qu’employeur de deux jeunes, dont Ahmed, 20 ans, employé en cuisine qui prépare un CAP cuisine. Il ne cache pas qu’il était « réticent au début à l’idée d’employer un jeune des quartiers car travailler dans une poissonnerie et un bar à huitres, c’est difficile et, comme tout le monde, j’avais des préjugés ». Serge Villeneuve a connu le programme par l’organisme de formation qui utilise son plateau-technique de restaurant-école pour former ses stagiaires.

« La part importante que tient le sport et ses valeurs dans le projet. Les jeunes transpirent, ils arrivent à l’heure… je n’aurais pas recruté ce profil de jeunes sans cette opération. C’est parce que le dispositif est un programme qui sort du cadre qu’il fonctionne. » 

David Vinson, partenaire du projet

Tout savoir sur le programme de POEC « Dispositif d’insertion par le sport »

 

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