Au cours d’une table-ronde, l’analyse du virage pris par les acteurs de l’alternance depuis la réforme de 2018 a permis de mieux comprendre les évolutions à l’œuvre. Ont été posés les enjeux d’attractivité et de professionnalisation, pour sécuriser les parcours et insérer durablement dans l’emploi…

Créée avec la réforme de 2018, la mission apprentissage de la Dreets permet à l’Etat d’intervenir en animation et en coordination sur les territoires, a souligné Valérie MONS, responsable du service apprentissage et formation. Au travail d’information, d’échange avec les CFA et les employeurs pour remonter les difficultés vers la DGEFP, s’ajoutent des actions visant à donner une autre image de l’apprentissage, et à promouvoir cette voie en réponse aux difficultés sectorielles à recruter.
La réforme et les aides exceptionnelles de l’Etat ont entraîné une hausse conséquente du nombre d’apprentis, ce dont les CFA se félicitent, mais ils doivent aussi gérer une charge administrative importante, a remarqué Cyril BARRANCO, président de la FNADIR Normandie. La professionnalisation des équipes se poursuit, avec de nouveaux publics ciblés grâce à des « stratégies multicanales » pour élargir le sourcing. Une approche rendue incontournable par le contexte concurrentiel, mais génératrice de coûts.
Le CFAie illustre parfaitement cette tendance, a abondé son directeur Patrice PIERRE. Passé entre 2018 et aujourd’hui de 1 698 inscrits à 2 140, l’établissement s’est structuré avec des cellules dédiées au recrutement, à la communication, à l’appui des employeurs pour la formalisation des contrats, et à l’innovation pédagogique. Sur ce dernier point, l’objectif de digitalisation des formations a donné lieu à un référentiel de compétences pour les formateurs. Pour chaque « palier » franchi sont prévues des rémunérations sous forme de primes, afin d’inciter à une diffusion des pratiques numériques innovantes pour une plus grande individualisation des parcours.

Du côté des employeurs, les volontés de mieux recourir à l’alternance et consolider les parcours se multiplient, a mis en évidence Eric TENCÉ, directeur général de Pep’s, un des 10 Geiq en France sur la propreté et qui revendique 500 contrats d’alternance par an conclus avec des publics éloignés de l’emploi. Afin de changer la représentation des métiers sur son secteur, des initiatives de recrutement en alternance après une POEC ont par exemple été imaginées autour des valeurs du sport. Démarrées en octobre à Rouen avec Akto, elles consistent à organiser des rencontres sportives pour lever les freins à l’emploi et orienter vers un parcours d’insertion par l’alternance. Un accompagnement social est prévu, pour apporter une solution en cas de difficulté financière, de mobilité, de logement, etc.
Dans un autre secteur, celui du travail temporaire, l’alternance fait aussi des émules, a témoigné Karen CLEMENT, directrice de la zone Normandie d’Humando Insertion, agence d’intérim d’insertion. Le recours aux contrats de professionnalisation et aux dispositifs spécifiques de la branche permet d’adapter les parcours à des publics qui ont souvent connu un décrochage scolaire et ne peuvent accéder directement à un titre professionnel. La nécessite d’une écoute attentive des besoins se fait sentir, pour proposer des suivis personnalisés avec, lorsque nécessaire, une habilité à changer de méthode pédagogique et à sortir des cadres habituels. Le dialogue entre employeur, centre de formation et alternant apparaît plus que jamais essentiel.